COVID-19 ou CRASH TEST D'UN MODÈLE DE SOCIÉTÉ

  • dimanche, 22 / 3 / 2020
  • Claire Couroyer

 "Une entreprise se crée seulement si elle répond à un besoin spécifique et elle perdure seulement si elle maintient une dynamique d'invention, d'innovation et de création collective".

Il s'agit de l'extrait de "L'entreprise, objet d'intérêt collectif" écrit par Nicole Notat et Jean-Dominique Sénard, et celui-ci prend tout son sens aujourd'hui.

Pourquoi ?
Parce que cette phrase s'applique aussi bien à l'Entreprise qu'à notre Société qui est à bout de souffle. Notre Société qui suffoque, manque d'oxygène, et est mise sous assistance respiratoire ; le parallèle est saisissant avec les personnes gravement atteintes de ce virus et qui luttent pour leur vie. La crise sanitaire mondiale provoquée par le Covid-19, exacerbe les dysfonctionnements chroniques de notre Société, malgré des alertes qui retentissent çà et là depuis un moment déjà.

Je vous propose donc un autre regard, une lecture de ce que nous vivons avec une certaine hauteur de vue, en faisant un parallèle permanent entre notre Société et l'Entreprise.

C'est le fruit de mes observations, analyses sur les corrélations et interactions entre les différents éléments de nos systèmes et la mise en lumière des paradoxes intenables que cela révèle. Mon article est un humble matériau de réflexion et de questionnement pour réveiller la pensée critique et inviter chacun de nous à poser ou à se poser les bonnes questions.

la formidable solidarité qui est en oeuvre

Liens sociaux et raison d'être
Qui aujourd'hui n'a pas fait d'apéro-visio ou équivalent ?

Nous avons la chance de disposer de moyens technologiques qui nous permettent une finalité : celle de rester en lien, où que nous soyons dans le Monde. Parce que nous sommes des êtres sociaux et que c'est vital pour notre santé mentale, notre survie. Peut-être serait-il intéressant de remettre les moyens à leur place, et la finalité à la sienne ?

Une Société/Entreprise sans une qualité de liens sociaux ne tient pas et s'effondre.
Nous voyons bien la formidable solidarité qui est en oeuvre pour combler les différents trous dans la raquette que cette situation met en exergue. ; comment les entreprises qui livrent leurs stocks de masques aux hôpitaux. Cette solidarité se fait parce que nous nous sentons liés les uns aux autres, quelles que soient les raisons, quels que soient les motifs, nous savons que nous sommes interdépendants.

Alors, comment retrouver une qualité des liens au sein de nos Sociétés/Entreprises ?
Comment éviter de confondre les moyens avec le but ?
Comment redéfinir les moyens nécessaires à chaque "objet" pour lui assurer la possibilité de réaliser la raison d'être pour laquelle il a été créé ?

 

une répercussion sur l'ensemble des parties prenantes


CRAST TEST DÉCLOISONNER

 

Le Leadership dans sa version complexe
Selon moi, l'élément fondamental du Leadership est de savoir donner du sens en toutes circonstances pour permettre la compréhension au plus grand nombre et permettre l'action qui doit en découler. Donner du sens, implique d'avoir fixé un cap lointain, savoir où aller, tout en ajustant la trajectoire en fonction des aléas, ce qui nécessite une aptitude à l'anticipation et la souplesse.

Nous voyons aussi à quel point des décisions prises à un moment donné, bonnes ou mauvaises, ont une répercussion sur l'ensemble des parties prenantes et crée des dommages collatéraux dont le coût de traitement se révèle plus élevé que celui de la prévention.

Le Leadership moderne s'exerce dans une complexité extrême qui nécessite combinaison de vision et d'actions long terme avec des opérations à court et moyen terme, facilitation des intelligences, grande connexion et compréhension de ce qui se passe dans le Monde, Intégration des impacts sociétaux, pour ne citer que les principaux talents.

Comment développer la culture de la prévention dans des Sociétés/Entreprises qui sont sous pression budgétaire/économique ?
Comment amener les investisseurs qui sont dans une vision de retour sur investissement, quoi qu'il en coûte, à intégrer ces nouveaux paramètres sociétaux ?
Comment s'assure-t-on des talents de vision stratégique, d'anticipation et de facilitation à la tête des Sociétés/Entreprises ?

Globalisation et Cloisonnement : le grand paradoxe
Une Société/Entreprise qui se dit globale et fonctionne en silos, est déjà un paradoxe en soi. Penser global signifie libérer la puissance d'action, quitte à ce qu'elle soit parfois démultipliée et complexe à gérer, mais la transversalité est de mise aujourd'hui.
Nous voyons bien que c'est par la communication, l'échange entre les scientifiques que le schéma se corrige et progresse, que les médecins qui prennent le relais, améliorent les études de leurs prédécesseurs.
Les modèles statiques doivent laisser place à des modèles dynamiques et résilients pour absorber les chocs présents et futurs.
Nos Sociétés/Entreprises ont vitalement besoin de plus de coordination, d'autant qu'elles sont interdépendantes les unes avec les autres.
Nous voyons bien que couper à un endroit, crée un problème ailleurs que l'on n'imaginait pas. Exemple : réduire la fréquence des trains ou des métros, handicape les soignants qui doivent se rendre au travail pour sauver des vies.

Comment faciliter ce décloisonnement et le rendre réel ?
Comment passer d'une logique de pouvoir (et de compétition) à une logique de coopération (et de Bien Commun) ?

 

Il n'y a pas de sot métier


Le monde à deux vitesses
Il y a celles et ceux qui télétravaillent comme ils peuvent, il y a ceux qui continuent à se rendre au travail, quel que soit leur statut ; et il y a aussi ceux qui ne sont "nulle part". Quoi que l'on dise, il n'y a pas de sot métier et plus que jamais, cet adage nous montre à quel point toute Société/Entreprise a besoin de "Doers", de Faiseurs. Nous le prônons depuis le début. Une Société/Entreprise équilibrée valorise aussi bien ses "penseurs" que ses "faiseurs", sans hiérarchie ; et n'oublions pas les couteaux suisses qui sont capables de penser et de faire.

En attendant, si les faiseurs n'existaient pas, nous serions bien dans le pétrin. La pensée sans l'action n'a pas de sens, et vice-versa. Aujourd'hui, un grand nombre d'entre nous applaudit tous les soirs à 20h pour rendre hommage aux personnels soignants, aux artisans (boulangers, fromagers, bouchers, poissonniers, etc), aux caissières & caissiers de supermarchés, aux chauffeurs routiers, aux agents de propreté des villes, aux ouvriers de maintenance et de logistique tous secteurs confondus, et j'en oublie. Les journaux titrent que c'est grâce à eux que le pays tourne. C'est vrai, alors souvenons-nous tous de cela demain.

Comment rendre nos Sociétés/Entreprises apprenantes ?
Pourquoi est-ce si difficile d'infléchir nos modèles devenus obsolètes ?

 

"Culture eats strategy at breakfast"

CRASH TEST PACMAN

Maturité et comportement des acteurs
Là, c'est le sujet qui fâche, et j'ai plaisir à reprendre la phrase de Peter Drucker qui dit "Culture eats strategy at breakfast" (la culture mange la stratégie au petit-déjeuner).

Nous avons fait la démonstration que des consignes identiques dans une Société/Entreprise donnée, ne produisent pas les mêmes effets.

Pourquoi ?
Parce que notre poids culturel se traduit dans les comportements observés de ces derniers jours face à des consignes de confinement. "Restez chez vous" n'a pas la même signification suivant l'endroit du globe.

Il est facile de vouloir quelque chose : cela tient du désir, de l'intention, de l'abstraction. Il est plus difficile d'actionner sa concrétisation, sa mise en oeuvre. Il y a donc des écarts dans toute Société/Entreprise entre ce que l'on veut faire, et ce que l'on réussit à faire vraiment. Et ça aussi, il faudra l'intégrer comme élément d'influence dans les décisions les plus stratégiques.

Comment faire évoluer les mentalités de l'individualisme vers un sens du collectif ?
Comment remettre la culture, le civisme, l'altérité au centre des valeurs universelles ?
Comment permettre à chacun de mieux s'approprier le changement ?
Comment éviter la double peine ?
(c'est-à-dire faire supporter à ceux qui contribuent déjà à l'effort collectif, de supporter une charge supplémentaire liée à une défaillance d'autres dont ils ne sont pas responsables).

 

Conclusion
La situation que nous vivons appelle à beaucoup d'humilité et à sortir du top-down, car elle montre qu'un seul corps ne peut pas tout savoir et a besoin de mettre en place des systèmes d'intelligences collectives. La taille de ces systèmes est aussi à questionner.

L'Entreprise est un modèle réduit de notre Société. Qu'elle soit entité publique ou privée, elle est par essence, un acteur social du moment qu'elle réunit des personnes en son sein.

Dès lors, Entreprise et Société ont à intégrer les enjeux sociaux, culturels et environnementaux dans leur vision stratégique pour sortir de la stratégie du "pompier-pyromane".

Parce que demain, l'addition (dans les deux sens du terme) de tous ces maux sera élevée, il faudra aussi balayer devant sa porte avant de demander des comptes, et prenons garde à ne pas repartir dans une course effrénée du chiffre qui ne pourra que nous faire perdre, tous.

Tâchons d'être constructifs et apprenants pour demain avant tout.

J. Claire Couroyer

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